A Copenhague, difficile de savoir où s’arrête l’espace privé et où commence l’espace public tant les deux sont imbriqués. Cette réussite spectaculaire, tant la fluidité de circulation est limpide, mais pas seulement,  renvoie en creux les insuffisances françaises en la matière.

Qu’il s’agisse d’un projet de recyclage urbain entre Christianshavn et Nyhavn, qui mixe sur plusieurs hectares logements, activités, bureaux, commerces, équipements, aménités… ou de la création d’un quartier à dominante tertiaire à Osterbro, les projets sont systématiquement conçus pour que l’on puisse traverser les périmètres privés, pour qu’ils se fondent dans l’espace urbain, sans rupture. On imagine que cet impératif fait partie de la « charte » urbaine de Copenhague et qu’il est profondément encré tant chez les acteurs publics que chez les acteurs privés.

Cette réussite spectaculaire, tant la fluidité de circulation est limpide, mais pas seulement,  renvoie en creux les insuffisances françaises en la matière.

Dans le cas où la puissance publique porte le projet de recyclage urbain, elle éprouve les plus dures difficultés à mettre autour de la table les acteurs (public et privé) du périmètre concerné, pour les amener à évoluer ensemble (et à éviter les ruptures urbaines). Voire pire, en général elle n’en voit même pas la nécessité. Du côté des acteurs privés, l’absence de culture urbaine les amène à se retrancher dans leur périmètre, voire à s’y barricader. Ce réflexe est d’autant plus regrettable quand il s’agit d’opérateurs de commerce, dont la vocation est d’être en intéraction avec l’espace public. L’espace urbain est alors la juxtaposition d’espaces public et privé.

Dans le cas où elle crée un nouveau quartier, la puissance publique a davantage de latitude à éviter les ruptures entre espace public et espace privé. Pensant anticiper les volontés des acteurs privés, elle s’empresse même de clôturer les périmètres des gestionnaires publics et privés. Car il s’agit bien de gestionnaires. Leur finalité technique (accès) et/ou sécuritaire justifie les barricades urbaines, au détriment du projet urbain. Ces périmètres congestionnés ne sont propices à aucun développement. Ils sont seulement destinés à vivre leur propre vie, sans ne jamais irriguer ou être irrigués par leur environnement.

Du côté des acteurs publics, réfléchir à tout type de projet urbain c’est d’abord se demander ce qu’on veut faire ensemble. Cette question du « ce qu’on veut faire ensemble » est primordiale car elle permet de définir le projet urbain, les acteurs que l’on veut attirer, autour de quelle ambition partagée, les interactions que l’on cherche à provoquer entre habitants et usagers temporaires. Elle établit une feuille de route claire qui accroit l’attractivité du territoire auprès des investisseurs privés les plus créatifs. Du côté des acteurs privés, est-ce pour m’investir localement, capter les dynamiques locales, contribuer au développement du territoire ou uniquement profiter d’un foncier moins cher ou d’infrastructure de transport plus efficace ?

L’intérêt métropolitain du Grand Paris doit intégrer la dimension du projet urbain pour ce qu’on veut faire ensemble, et pas seulement traiter l’intérêt métropolitain sous l’angle de la dimension stratégique des projets. Ignorer cet aspect ça serait ignorer les échecs retentissant de nombre de projets plus ou moins récents (le pire étant les projets en cours de construction déjà obsolètes).